L'énergie
Autre exemple de cette centralisation à tout prix, la production d'énergie.
Lorsque l'on parle d'électricité, il ne viendrait à l'idée de personne de croire que cette précieuse énergie puisse venir d'ailleurs que d'une centrale ! On centralise même les centrales en regroupant, par exemple, plusieurs réacteurs nucléaires sur un même site de production. Chacun se laissera facilement convaincre par l'argument imparable de "l'économie d'échelle". Et chacun est prêt à accepter la croissance exponentielle du risque, qu'il soit un simple risque de rupture de la production ou qu'il soit, comme ce pourrait être plus dramatique, celui de l'accident, qu'il faut bien considérer comme non-nul, même pour une centrale à gaz, comme démonstration vient d'être faite avec l'explosion d'une centrale aux Etats Unis.
Il est pourtant facile d'imaginer que plus l'unité de production sera petite, plus le nombre de clients concernés par un éventuel problème de production sera limité ! Facile aussi de reconnaître que plus la bouteille qui explose est petite et moins les dégâts seront importants ! Mais, cette "centralisation" est tellement inscrite dans nos habitudes, que l'on s'applique maintenant à "centraliser" des éoliennes dans des "parcs éoliens" ou des capteurs solaires en "fermes de production solaire", sans que personne ne s'étonne que ces sources d'énergie, pourtant bien réparties sur le territoire ne soient exploitées qu'avec de disgracieuses et encombrantes concentrations de matériels "centralisés".
Et la question n'est pas épuisée à ce point de la démonstration puisque une fois produite, cette énergie devra être transportée. Dans le cas de l'électricité, une perte non négligeable est subie lors du transport. Alors, pour limiter la perte et employer des câbles d'un diamètre raisonnable, on élève la tension (*), ce qui impose, pour permettre leur isolation la plus économique, des lignes aériennes montées sur d'immenses pylônes dont on connaît la fragilité dans de nombreux cas d'intempérie et dont l'esthétique est pour le moins discutable !
Pourquoi donc ne pas favoriser la production locale en construisant des bâtiments systématiquement couverts de "récupérateurs" d'énergie solaire (chaleur ou électricité) et en répartissant la production éolienne d'une manière plus "saupoudrée" ! Dans certains pays nordiques, le problème a été pris par le "bon bout" en permettant aux habitants d'investir directement dans la construction de leurs éoliennes et en participant au financement de leur entretien. Mais peut-être craint-on de ne pouvoir conserver un contrôle suffisant des moyens de production et des taxes qui leur sont associées ? Cet argument ne tient pas vraiment car, de toute manière, l'état sait très bien percevoir les taxes qui lui reviennent, il lui est inutile de recourir au centralisme pour se garantir les revenus qui lui sont nécessaires !
La production pourrait alors se présenter comme un maillage plutôt que comme des étoiles interconnectées. Ce nouveau schéma serait beaucoup moins fragile puisque la rupture d'un point de croisement ne pèserait pas bien lourd dans le schéma de l'ensemble. De plus, les lieux de production étant plus proches de ceux de la consommation, le transport serait moins problématique. Les risques d'accident se trouveraient réduits et l'emploi des personnels chargés de produire bien mieux réparti sur d'ensemble du territoire. Autant d'avantages dont devraient profiter ceux qui croient aujourd'hui détenir les clés de leur fortune en imposant la centralisation !!
(*) La règle P=U2/R indique que la puissance perdue en ligne dépend de la tension et de la résistance. La résistance dépend de la section du câble. Mais pour des questions mécaniques et économiques, il est préférable de limiter le plus possible la section des câbles. Alors, il ne reste comme solution, pour augmenter la puissance transportée en limitant les pertes en ligne, qu'à augmenter la tension. On arrive de nos jours à plusieurs centaines de milliers de volts (400 000 volts pour les lignes de transport) on pense même au million de volts dans certains cas (Sibérie...).